Être à la maison, enceinte, avec un petit garçon de deux ans en plein « terrible two », ce n’est pas toujours facile. Pourquoi ne pas ajouter un peu de défi et se lancer dans une aventure sur deux roues pendant près de six mois, en Nouvelle-Zélande, tout en réalisant un documentaire sur la route? Ce n’est pas tout à fait ce que je me suis dit quand Bertrand, mon amoureux, m’a proposé ce périple. Mais comme j’adore les voyages et l’aventure, je lui ai répondu : « Allons-y! »
Il faut mentionner que j’ignorais que j’étais enceinte à ce moment. Je l’ai découvert après deux semaines de voyage. Or, je ne me sentais pas prise au dépourvu parce que j’avais déjà fait du cyclotourisme au Brésil alors que j’étais enceinte de mon plus grand. Cette fois-ci par contre, c’était un peu différent. J’allais vivre les deux tiers de ma grossesse en voyage.
À l’occasion de la fête des Mères, je vous propose donc le petit bilan de notre voyage de famille (composée de trois membres et demi), après 25 semaines de grossesse et cinq mois de voyage en Nouvelle-Zélande.
Pédaler enceinte pendant le premier trimestre
Une grande fatigue m’a envahie après quelques semaines, mais heureusement, je n’ai pas été malade, hormis quelques maux de cœur le matin. Mais vous imaginez bien que ce n’était pas la grande forme pour pédaler. Nous avons tout de même avancé à un bon rythme, de 40 à 50 km par jour, pendant les deux premiers mois du voyage. Ça semble peu, mais avec un petit garçon de deux ans, c’était parfait!
Léo s’est très bien accoutumé au voyage à vélo. L’important pour lui, c’était d’être avec sa maman et son papa. Notre routine consistait à rouler quelques heures le matin et quelques heures l’après-midi, pendant sa sieste. Léo avait besoin de bouger hors de sa remorque. Pendant nos arrêts du midi et du soir, mon amoureux s’occupait beaucoup de notre fils, ce qui me permettait de me reposer un peu et de reprendre des forces. Moi qui adore faire du yoga, j’ai même arrêté ma pratique pendant cette période. Je n’avais pas assez d’énergie et le seul fait de me pencher me donnait le tournis. Heureusement, pédaler, c’était une activité qui me convenait bien. C’était même plus facile que de marcher ou de faire de la randonnée!
Parlons des montées…
Enceinte, je trouve que les montées ne sont pas faciles avec un vélo de 55 kg! D’autant plus que nous avons parcouru 1200 km en deux mois, avec quelque 10 000 m de dénivelé positif.
La plupart du temps, j’arrivais à pédaler seule, mais quand c’était trop difficile, je n’hésitais pas à marcher à côté de mon vélo. J’avais le beau rôle dans ces cas-là : soit que je montais tranquillement la route à pied, tandis que mon amoureux se transformait en bœuf et poussait en alternance nos montures; soit qu’il m’aidait à pousser mon vélo en appuyant sa sacoche avant droite sur ma sacoche arrière gauche. Par contre, ce n’était pas super bon pour lui, qui roulait avec un vélo de 100 kg et une faiblesse au genou à la suite de sa traversée du Canada. Vous vous demandez peut-être comment il faisait pour déplacer un tel chargement. Eh bien, il poussait fort! Il ne reviendra certainement pas de la Nouvelle-Zélande avec des kilos en plus, contrairement à moi!
Le rythme a changé au début du deuxième trimestre
Voyager avec un enfant, c’est merveilleux, mais il faut avouer que le repos des parents est plus difficile. Après deux mois de voyage et douze semaines de grossesse, nous étions fatigués. Nous avons donc décidé de stationner nos vélos pendant quelque temps pour recharger nos batteries et pour faire la première échographie de bébé 2.
En Nouvelle-Zélande, il est très facile de trouver une sage-femme. Grâce au site, www.findyourmidwife.co.nz, j’ai contacté l’une d’elles pour qu’elle m’explique comment je devais procéder pour obtenir un suivi de grossesse. Sékita-ra, la sage-femme à qui j’ai parlé, nous a même invités à camper sur son terrain, où nous avons passé deux nuits, avant de prendre l’autobus pour nous rendre au centre de radiologie le plus proche. Il faut dire que j’étais un peu inquiète pour bébé 2 à cause d’une petite chute à vélo survenue pendant ma 10e semaine de grossesse. Finalement, mon petit amour se portait bien au creux de mon ventre.
À Brightwater, la ville dans laquelle j’ai eu mon échographie, nous avons même été invités chez des amis de Sékita-ra. Nous y sommes restés près de deux semaines. Ce couple d’amis possède un immense terrain qui compte 500 oliviers et arbres fruitiers; un lieu parfait pour nous reposer et pour que notre petit homme dépense son énergie débordante. Jeanne et Simon, les propriétaires du terrain, étaient tellement gentils qu’ils nous ont même prêté un kayak pour aller explorer le merveilleux parc national Abel Tasman pendant quelques jours.
Après ce repos, nous avons enfourché nos vélos et parcouru tranquillement, pendant trois semaines, le nord de l’île du Sud, là où le soleil brille presque toujours. Un petit 440 km avec 3620 m de dénivelé positif, dont la fameuse Takaka Hill qui, avec ses 791 m d’altitude, se monte en plusieurs heures. Pendant la montée, nous avons même dû camper dans un garage pour éviter un orage!
Quand le vélo fait place au documentaire
Nous avons terminé notre visite de l’île du Sud à Picton, après trois mois de voyage et seize semaines de grossesse. De là, nous avons pris un traversier jusqu’à la capitale du pays, Wellington. Puisque mon amoureux fait un documentaire sur la Nouvelle-Zélande, nous avons dû délaisser nos vélos pendant près d’un mois. Nous avons passé deux semaines dans la capitale, puis nous avons pris un train en direction du célèbre parc national Tongariro. Ensuite, nous avons rejoint Rotorua, avec ses geysers et sa culture maorie. Mon amoureux a travaillé tard le soir, après le dodo de notre petit ange, pour préparer le scénario de son documentaire, gérer ses photos et ses vidéos et écrire des articles. Pour ma part, avec la grossesse et Léo, j’ai pris le peu de temps que j’avais de libre pour me reposer, lire, faire un peu de yoga et colorier des mandalas.
Avoir avoir quitté la capitale, j’ai enchaîné les petits rhumes, semaine après semaine. En voyage, pas facile d’être malade et enceinte, avec un petit garçon et un amoureux photographe et vidéaste passionné. En plus, avec l’arrivée de l’automne pluvieux, les nuits sont devenues de plus en plus fraîches. Je dois avouer que, quand je pensais à rentrer à la maison, je m’imaginais souvent devant mon poêle à bois ou dans mon bain chaud! J’ai tenu le coup dans ma tente froide et humide avec, en prime, un deuxième petit épisode de gastro pour Léo… question de rajouter du piquant à l’aventure! Heureusement que notre petit garçon s’est vite remis sur pied pour nous ramener au bonheur de vivre l’instant présent.
De retour sur mon vélo à 20 semaines de grossesse
Je me sentais de plus en plus enceinte. Ma bedaine commençait à prendre de belles proportions et je sentais que bébé bougeait régulièrement. En reprenant la route, je me suis aperçue que mon vélo m’avait manqué. Avancer au rythme des coups de pédale me redonnait de l’énergie. Ce n’était pas toujours rose, puisque nous devions emprunter l’autoroute 2, où la circulation était dense. Là, nous avons revêtu nos dossards jaunes pour la première fois. Il faut dire que c’est ici, dans la partie supérieure de l’île du Nord, que vit 80 % de la population. Les routes sont donc très fréquentées et les accotements ne sont pas nécessairement destinés aux vélos. Les camions chargés qui nous frôlaient ne me plaisaient pas du tout. Nous avons finalement quitté cet enfer pour suivre une route plus tranquille, qui faisait le tour de la péninsule de Coromandel.
Puis, nous nous sommes arrêtés quelques jours à Auckland. Mon amoureux filmait pendant que Léo et moi faisions la tournée des parcs de jeux. C’était rempli de beaux endroits pour lâcher son fou et rencontrer d’autres enfants.
Nous avons fui la grande ville en autobus pour nous rendre à l’extrême nord de l’île du Nord. De nouveau sur nos vélos, nous avons parcouru, en une semaine, 120 km pour nous rendre au cap Reinga, le point le plus au nord du pays. Ici, contrairement au Québec, plus on monte vers le nord, plus il fait chaud. Mais ce n’était tout de même pas les tropiques en cette fin avril où le vent d’automne était plutôt frisquet. Heureusement pour nous, il nous poussait dans le bon sens, alors que nous parcourions 20 km sur l’immense plage de Ninety Mile Beach. À marée basse, notre expérience à vélo sur le sable dur s’est plutôt bien passée.
Dix jours avec moi-même
Lorsque vous allez lire ces lignes, je serai à Vipassana, une retraite de méditation de dix jours. Un petit cadeau que je me suis fait en cette fin de voyage. Mon amoureux s’occupe de Léo pendant ce temps. Dix jours de silence et de méditation afin de recentrer mon énergie avant le retour au Québec et l’arrivée de bébé 2.
Ça finit bien un voyage en cyclofamille!