Avez-vous déjà entendu parler de Perse et Vérance? Qui sont-ils? Nous les connaissons depuis peu. Nous les avons découverts au tiers de notre voyage, au Texas et au Nouveau-Mexique. Ils étaient également présents dans les montagnes du Colorado, de l’Utah et de la Californie. Ils ne sont pas méchants. En fait, ils sont les partenaires de notre mental. Ils sont, somme toute, de très bons compagnons. Vérance est utile pour son côté motivateur. Perse lui, nous raisonne parfois et nous suggère des options plutôt alléchantes. Par exemple, il nous susurre occasionnellement de prendre une pause dans un motel. Or, cette suggestion, si nous la suivons, apporte toujours son lot de surprises. En cyclotourisme, le budget est restreint et les motels sont, la plupart du temps, de fausses récompenses. Bien souvent, les plus abordables sont les moins recommandables. D’ailleurs, les tapis de style années soixante semblent ne jamais avoir été changés depuis leur installation. Ils en ont vu des paires de pieds et ça se sent, croyez-nous! La literie n’a, quant à elle, probablement jamais été renouvelée et le matelas, inutile d’en parler. Nous en venons souvent à la conclusion que la tente, le matelas de sol, le sac de couchage et le gazon sont vraiment les meilleurs motels du monde!
Parlons du mental. C’est le général en chef de notre corps. C’est lui qui gère tout. Sauf que, sans ses deux acolytes Perse et Vérance, il n’est pas très efficace. Quand nous sommes dans un désert, dans une montée de plusieurs dizaines de kilomètres, dans une journée froide et pluvieuse ou dans une rafale de 65 km/h, le mental suggère au corps de tout arrêter. Surviennent alors les conseils de Perse et Vérance qui l’invitent à reconsidérer la raison de tous ces efforts. Or, si nous avons réussi à traverser les États-Unis d’est en ouest, sans jamais acheter d’eau embouteillée, c’est aussi grâce à ces deux maîtres à penser. Manger du bitume! Manger du bitume jusqu’à l’épuisement, tout en gardant le moral! Les montagnes, nous les avons gravies sur des kilomètres et des kilomètres avec un vent de face, sur des dénivelés de près de 14 %. Nous abandonnons ou nous continuons? Ensemble, nous continuons!
Nous avons atteint la côte ouest américaine il y a quelques semaines. Un moment de fierté et d’accomplissement rempli d’émotions. Cependant, notre défi n’est pas terminé. Perse nous rappelle qu’il y aura une fin à ce voyage. Vérance nous suggère de changer l’itinéraire. Changer l’itinéraire? Ce n’est peut-être pas une si mauvaise idée que ça après tout. Pourquoi ne pas revenir chez nous à vélo? Faire une deuxième traversée, mais cette fois, d’ouest en est. Faire la grande boucle de l’Amérique du Nord. Merci Perse et Vérance! Quelle belle équipe vous faites tous les deux!
En vélo, nous sommes souvent seuls. Bien sûr, nous sommes deux à rouler à quelques mètres de distance, mais nous sommes quand même isolés dans notre petite bulle. Six heures par jour, nous nous perdons dans nos pensées, dans un tourbillon de questionnements. Pourquoi avons-nous décidé de monter ce col et de souffrir ainsi? Pourquoi avons-nous laissé notre confort à la maison pour vivre dans une tente et des sacoches depuis plus de cinq mois? Qu’allons-nous faire à notre retour? Comment trouver la force de monter un autre col demain? Bref, sur la route, le mental se met en branle et il prend ses aises.
Vérance prend alors la relève. Il nous rappelle la chance que nous avons de pouvoir découvrir les plus beaux paysages de l’Amérique sur deux roues et de vivre ces moments privilégiés, sans suivre les trajets hyper-touristiques des autobus remplis de photographes boulimiques. D’ailleurs, nous avons souvent l’impression que plus nous travaillons fort dans une montée, plus nous méritons de contempler ces paysages; des paysages plus beaux que ceux qui nous font rêver dans les livres. Les paysages de l’Utah et de la Californie sont tellement beaux et incroyables qu’ils donnent envie d’y rester.
Or, un nouveau défi nous attend. Celui de revenir à la maison. Nous continuons notre route, plus motivés que jamais. Nous avons parcouru plus de la moitié de notre aventure et il nous reste encore une tonne de choses à découvrir. Pour la suite, nous pédalons avec Perse et Vérance, en nous remémorant cette inspirante phrase de Victor Hugo : « Comme le matin, il regardait passer les arbres, les toits de chaume, les champs cultivés, et les évanouissements du paysage qui se disloque à chaque coude du chemin. C’est là une contemplation qui suffit quelquefois à l’âme et qui la dispense presque de penser. Voir mille objets pour la première et pour la dernière fois, quoi de plus mélancolique et de plus profond! Voyager, c’est naître et mourir à chaque instant. »
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