La liberté en Terre de Baffin

Partir en randonnée pédestre pour une journée, c’est facile. Partir trois jours, ça demande un peu plus d’organisation. S’aventurer une semaine en autonomie complète requiert encore plus de préparatifs. Or, quand est-il de partir près de quatorze jours, toujours en autonomie complète et, pourquoi pas, dans le Grand Nord ? Eh bien, ça demande non seulement de la préparation, mais également plusieurs séances d’entraînement. C’est ce que nous explique un passionné de plein air de La Cordée, Pierre Laliberté, qui s’envolera bientôt pour une grande expédition sur l’île de Baffin située au parc national Auyuittuq. Dans cette chronique, venez découvrir les raisons pour lesquelles il a choisi les territoires nordiques comme terrain de jeu, la façon dont il s’est préparé pour cette grande expédition et bien plus encore…

L’élément déclencheur

 

PierreCamel'sHumps-72 Laliberté, employé de La Cordée à Saint-Hubert, est un passionné de plein air et de la nature sous toutes ses formes, comme en témoigne sa formation de naturaliste. Âgé de 58 ans, il compte plusieurs petites randonnées à son actif, mais il souligne ne « jamais avoir vraiment participé à de grosses expéditions. » Pourtant, ce n’était pas l’envie qui lui manquait ! C’était plutôt un concours de circonstances qui freinait son désir de partir à l’aventure.

Toutefois, il y a un an et demie, la vie a asséné un dur coup à Pierre, qui s’est ouvert à de nouvelles possibilités. « J’ai eu un petit problème de santé. Mon médecin m’a fait comprendre que j’ai été chanceux de m’en sortir sans séquelles », explique-t-il. Toutefois, l’ombre d’un cancer planait sur lui. En attendant les résultats de ses examens, il s’est demandé quel était son plus grand regret. Sa réponse : « Ne pas avoir été dans le Grand Nord. J’ai toujours rêvé d’y aller, et ce, depuis que je suis tout petit. » Quand le médecin lui a annoncé que tout était beau et qu’il n’y avait aucune trace de cancer, Pierre n’a pas attendu une seconde de plus pour mettre en branle son projet de découvrir le cercle polaire. Il a donc repris contact avec un ancien employé de La Cordée à Montréal, Louis-Philip Pothier, désormais guide au Nunavut. Ce dernier a fondé sa propre entreprise d’aventure, Inukpak Outfitting inc. (Inukpak se traduit de l’inuktitut au français par « gentil géant », nom qui représente parfaitement le fondateur de l’entreprise).

Les préparatifs

Camel'sHumps-99Ainsi, le rêve commence à prendre forme et tout se met en place pour qu’il se réalise. Avec son guide, Pierre prévoit traverser l’île de Baffin du nord au sud en empruntant le mystique passage Akshayuk sur une distance totale de 98 km. « Le trek, en tant que tel, n’est pas difficile, mais l’environnement arctique, lui, peut nous réserver quelques surprises », précise Pierre.

Pour ne pas être pris au dépourvu, l’adepte de plein air décide de s’entraîner à marcher avec le poids qu’il devra porter tout au long de l’expédition, soit un sac à dos de 45 lb. « Le défi là-bas, c’est d’abord la charge, mais c’est aussi de marcher sur un sol très rocailleux et de parcourir un territoire traversé par beaucoup de rivières », précise-t-il. Ce dernier point, la traversée de cours d’eau alimentés par la fonte des glaciers, représente d’ailleurs un grand danger dans l’expédition. L’eau y est limpide, merveilleuse, et pourtant glaciale. Le courant peut s’avérer très fort par moments. « Il faut parfois attendre plusieurs heures avant de pouvoir traverser », explique Pierre. « Il faut aussi apprendre à traverser et à détacher nos sacs à dos très rapidement au cas où le courant nous entraînerait avec lui », ajoute-t-il. À noter que, justement, le courant est particulièrement puissant et les traversées sont plus à risque entre la fin de juillet et le début d’août, soit les dates exactes de l’expédition…

Bien qu’il ait choisi de faire son trek en été, les températures au cercle polaire arctique seront loin d’être estivales. « En fait, en ce moment [en juin], on y pratique encore la pêche sur glace », affirme Pierre. En juillet, le temps devrait toutefois se réchauffer un peu, mais les températures resteront bien loin de celles du Québec. Aucun risque de canicule ! « Quand tu vas dans le Grand Nord, tu ne te bats pas avec la météo. Tu la respectes et t’y adaptes », explique le naturaliste paré à toute éventualité.

Les attentes

Camel'sHumps-4Un terrain difficile, le risque de croiser des ours polaires lors des premiers jours sur l’île et la température froide ne feront pas reculer Pierre, qui est de plus en plus excité à l’idée de partir pour le Nunavut. Et, comme si ces bémols ne suffisaient pas, on lui a dit, en plus, que les mouches sont particulièrement énormes et en grand nombre par là-bas ! Mais encore une fois, c’est loin de le décourager. « J’ai vraiment hâte de profiter des paysages, d’admirer la nature et d’expérimenter un soleil qui ne se couche jamais », lance le randonneur.

Marcher tous les jours n’effraie pas le pleinairiste. « J’ai passé trois semaines sur le chemin de Compostelle. Je sais ce que cela représente de marcher toute une journée », précise Pierre. Puisque sa marche de 98 km sera répartie sur quatorze jours, il espère pouvoir prendre tout le temps nécessaire pour explorer la faune et la flore arctiques. D’ailleurs, il s’est équipé d’un nouvel appareil photo, avec lequel il désire immortaliser ses découvertes.

Pierre se fait un immense cadeau en laissant ses craintes de côté afin de se lancer tête première dans une aventure taillée sur mesure pour réaliser ses rêves. Tout au long de sa vie, il a rencontré plusieurs obstacles, qui le faisaient la plupart du temps reculer. Néanmoins, avec son trek sur l’île Baffin, le naturaliste se dit enfin prêt à foncer et à mordre dans la vie à pleines dents. « Je vivais dans le passé. J’avais peur de l’avenir, mais je suis maintenant bien ancré dans le présent et je regarde droit vers l’avenir avec beaucoup d’enthousiasme ».

Cet homme, qui s’envolera bientôt vers le Nunavut, pour ensuite naviguer jusqu’à l’île de Baffin, a le cœur léger et des papillons au ventre. La Cordée te souhaite une très belle expédition, Pierre. Reviens-nous avec tous tes morceaux et plein de souvenirs à partager !