Le monde n’a jamais été si petit et n’a jamais offert autant de possibilités pour ceux qui désirent sortir des modèles traditionnels de carrières. Voici quelques-unes de ces personnes qui ont transformé une passion en travail.
Jennifer Doré Dallas
Jennifer Doré Dallas a débuté son populaire blogue voyage Moi, mes souliers, en 2010, à une époque où les influenceurs et les instastars n’existaient pas encore. En fait, la Montréalaise a toujours été animée par l’envie de créer du contenu.
En parallèle à son blogue, la jeune femme gravit les échelons dans des firmes de consultation en technologies de l’information (TI). Ses talents d’écriture l’amènent à faire des appels d’offres et de la rédaction, en plus d’implanter des méthodes de travail. Puis, en 2012, son blogue gagne en popularité, et elle souhaite voyager davantage (et surtout se rendre plus loin qu’au centre-ville chaque jour). Début 2013, elle prend une sabbatique… et ne revient jamais au travail de bureau.
Depuis, Jennifer continue de créer du contenu, beaucoup de contenu. Son blogue lui a permis, au fil des années, de se faire des contacts avec des bureaux de tourisme, avec d’autres sites web, et auprès d’éditeurs de guides de voyage comme Ulysse et Lonely Planet.
Elle a en outre écrit sur San Diego et plusieurs autres destinations, en plus de collaborer au populaire livre Testé et approuvé : le Québec en plus de 100 expériences extraordinaires.
Avec tout ça, Jennifer gagne aujourd’hui sa vie presque à 100 % avec ses écrits, et elle voyage environ la moitié de l’année. Elle continue d’entretenir régulièrement son blogue (à un rythme qui m’impressionne hautement!) en écrivant de nouveaux billets sur des destinations inusitées, des trucs pratiques ou des suggestions gourmandes. Ses publications ne lui apportent pas réellement de revenus intéressants, mais elles la font connaître en alimentant un portfolio virtuel. « Sans mon blogue, je pense que je n’aurais aucun des contrats que j’ai, car c’est lui qui m’a donné ma crédibilité et qui m’aide à la conserver », m’écrit-elle… en direct de Porto Rico!
Pour compléter tous ses écrits, la blogueuse me dit ajouter à son horaire quelques contrats de gestion de médias sociaux, de rédaction, de traduction et de révision, ou même agir encore quelquefois comme consultante en appels d’offres en TI. Elle a aussi fondé et elle gère Voyage numériQC, un réseau qui met en relation les marques, les destinations et les influenceurs. « On crée des campagnes et on les [les influenceurs] aide à mieux travailler ensemble pour que les deux parties en tirent avantage », détaille-t-elle.
Enfin, elle a même trouvé le temps de réaliser et de présenter un film sur les Îles de la Madeleine aux Aventuriers voyageurs.
« J’aime travailler, j’aime réaliser des choses, et je ne compte pas mes heures », conclut Jennifer. Et elle commence ses matins avec un entrain qu’elle n’a jamais eu dans le métro, en route vers le centre-ville.
Sarah-Émilie Nault
Sarah-Émilie Nault a été enseignante plusieurs années avant de bifurquer vers le journalisme indépendant et de se spécialiser en voyages et en culture. Aujourd’hui, on peut la lire notamment dans le HuffPost Québec, dans Vélo Mag, dans le Journal de Montréal, le Journal de Québec et sur voyagevoyage.ca.
Cette trajectoire voyage s’est prise un peu par hasard, et beaucoup par choix. C’est en voyant le plan de cours d’une amie enseignante qui venait de s’inscrire au certificat en journalisme que Sarah-Émilie a décidé de faire de même. Puis, lors d’une soirée de réseautage au certificat, la future prolifique écrivaine a appris qu’il était possible de se spécialiser en tourisme et voyages. Un plan parfait pour celle qui voyageait déjà beaucoup pour le plaisir. « Je me suis lancée en pitchant à divers médias portant sur le voyage, m’explique-t-elle, et ça a tout de suite fonctionné! »
Aujourd’hui journaliste indépendante, la jeune femme possède un réseau de clients à qui elle propose des sujets. Alors qu’elle pouvait partir 2 ou 3 fois par mois il n’y a pas si longtemps, pour des voyages de presse, elle choisit maintenant de couvrir davantage les arts et spectacles au Québec et de ne partir qu’une semaine par mois. Ses voyages sont organisés par des clients qui veulent promouvoir leurs destinations, par exemple un office de tourisme, un hôtel ou une agence travaillant avec un transporteur aérien ou ayant un nouveau forfait à offrir. Son salaire vient ensuite du journal ou d’autres médias qui achètent l’article sur la destination en question. C’est à force d’écrire que son nom circule et qu’elle peut maintenant choisir davantage les contrats qui lui plaisent.
Sarah-Émilie me confie aussi qu’elle travaille beaucoup dans les avions, soit à écrire ses textes sur des destinations encore fraiches dans sa tête, ou à faire de la sélection de photos. « Une tâche difficile ! », rigole-t-elle. D’un peu partout dans le monde, elle réussit néanmoins à produire en moyenne un article par jour.
Comme beaucoup de travailleurs autonomes, l’autrice remplit aussi son horaire de nombreux autres projets. Tout comme Jennifer, elle a collaboré au guide Testé et approuvé : le Québec en plus de 100 expériences extraordinaires, dont un tome 2 est d’ailleurs en préparation. Elle a aussi collaboré à certains guides Ulysse et à un collectif de récits de femmes ayant voyagé en solitaire et qui verra le jour sous peu (Elles ont conquis le monde en solo, publié aux Éditions de l’Homme et dirigé par Ariane Arpin-Delorme.) Surtout, elle a écrit et publié l’an dernier le superbe livre Caféine : lieux et artisans d’ici, qui porte sur le fascinant monde des cafés indépendants.
Avec un horaire aussi atypique et chargé, et autant de projets variés, Sarah-Émilie peut certainement se permettre quelques cafés, ici comme en voyage!
Jonathan B. Roy (c’est-à-dire moi-même)
Vivre du voyage n’était pas un rêve pour moi, ni même quelque chose que j’avais prévu. Mon objectif à la base était de faire un voyage de vélo, de l’Europe à l’Asie, pour une durée d’une année, puis de revenir au Canada. Et maintenant, je voyage depuis près de trois ans et demi.
Au début de mon périple, j’ai commencé un blogue afin d’éviter d’envoyer plusieurs fois le même courriel à toute ma famille et à mes amis pour leur dire où j’étais rendu et comment j’allais. J’ai pris plaisir à améliorer mes écrits et mes photos au fil de mon parcours. Après 6 mois de voyage, j’ai commencé à recevoir quelques offres pour écrire ailleurs. J’ai ainsi eu la chance de collaborer avec La Presse, puis avec le magazine Vélo Mag auquel je participe encore à chaque édition.
Quand on publie un livre, il faut ensuite en faire la promotion. Je suis alors revenu au Québec pour la première fois en plus de deux ans. J’en ai profité pour offrir une conférence aux entreprises, aux écoles et au public sur mes histoires. Depuis, j’ai repris la route à vélo, mais je reviens au pays environ deux fois par année pour donner d’autres conférences. Celles-ci forment aujourd’hui la majorité de mon salaire. Mes autres revenus viennent de mes articles et vidéos chez Vélo Mag, ainsi que de la vente de livres et de photos
Tout comme Jennifer, je continue de publier du contenu sur mon blogue et mes médias sociaux. Ce sont eux qui me font connaître et m’aident ensuite à publiciser mes conférences et la vente physique de mon livre.
Je ne gagne pas (encore) assez de sous pour remplir mes REER, mais je suis entièrement maître de ce que j’écris, de ce que je visite, et je n’ai pas à toucher à mes économies. Et puis, tous ces coups de pédale me font certainement accumuler un autre type de richesse, celle qui ne se calcule pas dans un compte de banque.
Autres options
Le web est aussi plein de youtubeurs et de photographes qui travaillent fort pour sortir du lot. D’autres font des revues d’équipement et mettent des liens affiliés de leur site web vers Amazon pour faire un petit pourcentage sur les ventes. Enfin, les sites web les plus populaires peuvent inclure de la publicité.
La majorité de ces options voguent autour du thème de l’écriture, mais plusieurs personnes tirent leur épingle du jeu d’autres façons. Les meilleurs métiers sont ceux qui peuvent se pratiquer de n’importe où, avec une connexion internet : traducteur, programmeur, graphiste, etc. Pour les plus jeunes – moins de 30 ans, ou 35 ans dans certains pays – les visas de travail-études permettent d’habiter facilement jusqu’à deux ans dans plusieurs pays, et de s’y trouver un emploi sur place. Avec un visa déjà en poche, trouver du travail localement est beaucoup plus facile.
En conclusion
Peu importe l’option choisie, travailler en voyage n’est pas facile et demande beaucoup d’énergie et de discipline. La phrase « être travailleur autonome, c’est travailler 80 heures par semaine pour le privilège de ne pas travailler 40 heures par semaine » n’est pas loin de la réalité.
Être son patron, ça veut généralement dire que les années ne se ressemblent pas et que l’on doit s’inventer un travail tout en cherchant constamment de nouveaux contrats.
Dans mon cas, je travaille en outre fréquemment de ma tente sur mon matelas de sol, à écrire des textes ou à classer des photos. Mais ne répondre de personne, vivre des aventures et voir du paysage, et surtout ne pas avoir à me rendre au bureau chaque jour en vaut – la plupart du temps ! – la peine.
Photo d’en-tête : Aller chercher de nouvelles aventures est souvent difficile. Moi-même au milieu de l’aride pampa en Argentine.
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