Atteindre de nouveaux sommets avec votre entraînement

Directeur du programme de recherche en insuffisance cardiaque et transplantation cardiaque à l’Institut de Cardiologie de Montréal, Michel White est également un cardiologue de grande réputation. Soucieux de faire reconnaître l’importance de l’activité physique pour la santé cardiovasculaire, il s’est engagé dans divers projets sportifs auprès des personnes greffées. Sport et santé n’ont plus de secrets pour lui. Fidèle collaborateur de La Cordée, le docteur Michel White vous propose, dans le texte qui suit, d’en apprendre plus sur une activité physique excellente pour le cœur : la randonnée pédestre.

Cette chronique compare la randonnée pédestre, communément appelée le trekking, à l’alpinisme, ascension en haute altitude. La randonnée pédestre constitue toute forme de marche sur sentier à des altitudes de moins de 2 500 mètres. Au Québec, il est beaucoup plus accessible et commun de pratiquer la randonnée pédestre puisque le plus haut sommet, le mont d’Iberville situé dans les monts Torngats, ne possède une altitude que de 1 652 mètres.

Néanmoins, de plus en plus de Québécois voyagent à l’extérieur du pays à la recherche de plus hautes montagnes à gravir. Alors que les avantages de l’activité physique prolongée à basse vélocité comme la marche en forêt sont bien documentés, ceux de la marche en haute altitude sont moins connus des randonneurs. Voici quelques comparaisons de ces deux activités pour l’adepte de randonnée pédestre qui souhaiterait, un jour, faire de la haute altitude.

AVANTAGES :

  1. L’activité prolongée de type trekking ou ski de randonnée augmente votre santé cardiométabolique.

Bien que l’intensité de l’effort puisse être trop basse pour augmenter votre capacité cardiopulmonaire, elle contribue à augmenter les qualités cardiopulmonaires (ce qui constitue votre endurance). En d’autres mots, elle améliore la capacité de travailler de longues heures sans épuisement.

En plus de vous faire voir du pays, la randonnée pédestre de plusieurs heures améliore votre endurance à l’effort et fait perdre du poids. De plus, cette activité contribue à réduire l’insuline et le glucose qui circulent dans le sang et aident à diminuer le cholestérol sanguin. Ainsi, l’activité prolongée est très favorable à la santé de votre système cardiovasculaire.

  1. L’ascension à haute altitude peut améliorer votre condition physique

Être en haute altitude peut être catégorisé comme une exposition aiguë, chronique (adaptative) et prolongée. L’exposition aiguë à la haute altitude (de 24 à 48 heures à plus de 2 500 mètres) augmente les besoins en oxygène de l’organisme et peut être utilisée comme stimulant de l’entraînement pour améliorer la capacité cardiopulmonaire. L’utilisation d’un hypoxicator en est un exemple.

L’hypoxicator est un instrument médical capable de simuler un environnement comparable à la haute altitude, avec moins d’oxygène (hypoxie). Son utilité dans la préparation à des épreuves à basse altitude demeure néanmoins controversée. Par contre, le stimulus hypoxique (sans oxygène) est pertinent lors de la préparation à des épreuves aérobiques en altitude telles que l’alpinisme, la course sur sentier et le vélo de montagne.

Après de dix à quatorze jours en altitude, on atteint la phase adaptative. À ce stade, la production de globules rouges dans le sang augmente, ce qui améliore l’apport en oxygène de l’organisme et le confort ressenti en haute montagne : on respire mieux et on a plus d’énergie. Toutefois, la capacité cardiopulmonaire maximale n’augmente pas de façon significative en raison d’un certain « désentraînement » des muscles, qui se traduit par une perte de force et de puissance. Ce n’est qu’après plusieurs semaines en altitude, lors de la phase prolongée, que l’adaptation de notre corps à l’environnement se produit à tous les niveaux : cardiaque, pulmonaire, hématologique et métabolique.

INCONVÉNIENTS :

  1. Les activités de randonnée pédestre prolongée développent peu ou pas du tout la musculature.

Il est même fréquent de noter une diminution du volume du quadriceps après plusieurs jours de randonnée. Conséquemment, une bonne mise en forme musculaire incluant des exercices qui sollicitent de larges groupes musculaires est essentielle afin d’éviter les blessures de surutilisation. Prévoyez donc un programme d’entraînement de douze semaines, minimum. Ces recommandations peuvent tout à fait s’ajouter à celles appliquées lors de la préparation musculaire à la course à pied. L’incorporation de l’entraînement de type plyométrique (exercice de type explosif incluant des sauts) est particulièrement efficace après quelques semaines d’entraînement régulier au préalable.

  1. La stimulation hypoxique aiguë est exigeante pour la santé.

L’exposition aiguë (de 24 à 48 heures) accroît la demande cardiopulmonaire en augmentant les hormones de stress et, conséquemment, la fréquence cardiaque. La tension artérielle baisse dans les 48 premières heures, mais remonte au-dessus des valeurs de base par la suite. Au-dessus de 2 500 mètres, on peut noter l’apparition de certains symptômes du mal aigu des montagnes : maux de tête, fatigue excessive et essoufflement à l’effort léger. Ce type de symptômes est présent chez 20 % des gens à plus de 2 500 mètres et chez 40 %, à une altitude de 4 000 mètres et plus.

En somme, la clé du succès pour vous aventurer sur de très hauts sommets en demeurant dans la zone du plaisir, avec le moins d’inconfort possible, est d’y aller progressivement et d’être accompagné de gens expérimentés. Il faut commencer par des altitudes modestes en demeurant dans la phase aiguë. Cela va vous permettre d’apprivoiser ce genre d’activité et votre environnement. Par ailleurs, même lorsque vous montez à de hautes altitudes, il est recommandé d’interrompre l’ascension par quelques descentes à des altitudes moins élevées. Ainsi, vous permettez à votre corps de s’adapter au manque d’oxygène. C’est pourquoi il est commun d’entendre lors de l’ascension du mont Everest, par exemple, que les grimpeurs redescendent pendant quelques jours à des altitudes plus basses. Ce recul facilitera ensuite l’ascension et permet d’atteindre le sommet en minimisant les dangers de l’inconfort.

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Ce qu’il faut retenir

  1. La randonnée pédestre est un excellent exercice pour la santé physique et mentale. Cette activité physique est particulièrement efficace pour l’atteinte et le maintien d’un poids santé.
  2. Une préparation physique ciblée, qui vise principalement la musculature, contribuera à éviter les blessures, surtout aux genoux.
  3. L’exposition aiguë à la haute altitude comme stimulus de l’entraînement aide à se préparer à des expéditions en haute montagne, exigeantes sur le système cardiopulmonaire.
  4. Pour faire de l’alpinisme, il faut y aller progressivement et s’entourer de personnes d’expérience. Si vous avez des antécédents de problème cardiopulmonaire (ou avez ce genre de problème), vous devez procéder à une évaluation médicale avant votre départ pour une aventure en haute montagne.

 

Bonne montée!

 

Michel White MD

m_white@icm-mhi.com