Le retour aux sentiers… en France

Je me suis levée un matin d’octobre avec l’envie de clore mon année de course avec un marathon sur sentier. Cette année a été assez calme sur le plan de la course : j’ai arrêté de courir pendant plusieurs mois à cause d’une blessure, je me suis découvert de nouvelles passions sportives et j’ai repris l’entraînement graduellement, en augmentant mon kilométrage hebdomadaire le plus sagement possible.

Depuis septembre, j’ai participé à des événements de course de 13 km et de 20 km. Puis, un matin d’octobre, je me suis dit qu’il était temps que je vive une expérience de course plus longue pour poursuivre ma progression physique et mentale vers les ultramarathons. Bien que ma tête rêvait de courir un 50 miles (environ 80 km), je devais me rendre à l’évidence : un marathon était suffisant pour tester mes nouvelles jambes!

Je savais que je ne trouverais pas ce que je voulais au Québec, outre le marathon de sentier de Montréal, où j’allais déjà encourager Louis-Philippe avec les enfants. Je me suis alors mise à rêver de faire un marathon en France, car j’ai la chance de me retrouver dans ce superbe pays assez régulièrement pour ma vie professionnelle.

Je me suis donc mis le nez dans la revue Trails Endurance (l’édition de janvier 2016) qui présente une quantité impressionnante de courses sur sentier organisées sur le territoire français. J’ai scruté les dates, les distances, les descriptions des parcours et je suis tombée sur une course dénommée Gem Trail, dans laquelle on nous promettait 42 km de sentier avec 2500 m de dénivelé positif. En plein ce qu’il me fallait pour terminer mon année!

Je me suis donc retrouvée, cinq semaines plus tard, sur le départ de cette course, dans un superbe amphithéâtre extérieur à Gémenos, une charmante petite ville dans le sud de la France, tout près de Marseille.

photo3Église de la ville de Gémenos au centre du village.

Ma course

Nous sommes peu nombreux sur le départ (environ 100 coureurs), mais l’ambiance est très bonne. Nous recevons plusieurs consignes de sécurité, dont celle d’être très prudents dans l’atteinte des sommets des montagnes, car nous nous y retrouverons dans la bruine et les nuages, avec des rafales de près de 100 km/h. Sans compter que les sentiers glissants et techniques nécessiteront quelques fois de se tenir avec une corde pour descendre. C’est du nouveau pour moi, qui n’a jamais vraiment expérimenté ce type de conditions en course.

photo4Source: Gem Trail

Le départ est donné; je cours vite. Je parcours un bon 15 km assez roulant avec des sentiers qui grimpent et qui descendent. Les organisateurs nous avaient prévenus: « Vous allez vous faire plaisir sur ces sentiers, mais attention de ne pas vous faire exploser les jambes trop vite, car la montée commence après. »

Je fraternise avec Martine, une coureuse d’une cinquantaine d’années qui descend comme une flèche toutes les descentes techniques. Nous passons près de 17 km à nous échanger la 2e et la 3e place, dans la bonne humeur, la rigolade et le plaisir, avec quelques fois le souffle court. Martine m’encourage à plusieurs reprises : « Va chercher la première, tu es jeune toi! » Je quitte Martine au 17e kilomètre et je poursuis mon chemin, les jambes assez légères. (Nous nous sommes retrouvées à la toute fin de la course.)

Entre le 20e et le 28e kilomètre, la montée est assez raide : environ 800 m de dénivelé sur 6 km. Je grimpe assez aisément, en dépassant plusieurs coureurs qui prennent le temps de m’encourager. J’adore l’ambiance des courses sur sentier. Les coureurs et coureuses sont très souvent sympathiques, souriants, heureux et respectueux des autres coureurs. C’est d’ailleurs une consigne importante dans ce type de course : nous nous devons d’apporter du soutien à quiconque en aurait besoin sur le parcours.

Je ne l’ai pas encore mentionné, mais les paysages de Gémenos sont tout simplement spectaculaires. À plusieurs reprises, j’ai l’idée de m’arrêter pour prendre des photos. Mais comme je suis dans une course, je choisis de suivre les conseils de Martine, qui m’avait déjà dit que je trouverais des photos sur le blogue de l’organisation.

La grimpe jusqu’au 28e kilomètre a pris plus d’une heure trente. J’avais prévu le coup dans mon plan de course et c’est ce qui a fait que je ne me décourage pas pendant cette longue montée. Je me retrouve au sommet de la montagne dans les vents, le froid, le brouillard et la bruine. À cet endroit, il m’est impossible de voir plus de dix mètres à la fois. Je choisis de ralentir le pas et d’attendre le coureur derrière moi afin d’éviter de m’égarer. Il m’informe que la vue est sublime à cet endroit, car on y voit la mer quand il fait soleil. Je lui dis que je reviens assurément, car ce n’est pas mon coin de pays. « Tu viens d’où? », me demande-t-il. « Montréal! » « Montréal en Savoie? » « Euh…non Montréal au Québec! » (Ah! ah!)

La descente est incroyablement technique et le coureur qui m’a accompagnée en haut de montagne descend aisément dans celle-ci. Je ne fais qu’entendre ses souliers glisser sur des roches mouillées alors qu’il disparaît dans le brouillard. Moi, je prends mon temps.

Sortie du brouillard, je poursuivis ma course dans une superbe descente, qui nous permet d’admirer (d’un coup d’œil rapide!) la splendeur des montagnes environnantes. (Je dis un coup d’œil rapide parce que le sentier est encore technique et la descente, très abrupte.)

La suite de la course nous amène à courir sur les crêtes des montagnes. C’est superbe! Tout simplement superbe! Pourtant, c’est à ce moment précis que la fatigue se fait sentir. Une fatigue mentale et émotive, plus qu’une fatigue physique. C’est un phénomène que je connais et que j’ai appris à apprivoiser. Dans ces moments intenses, il faut les mots ou les images qui permettent de s’accrocher : les mots de mon amoureux, les encouragements de mes amis et de ma famille, les efforts déployés toute l’année pour vaincre ma blessure, etc. Et je m’accroche à mon plan de course, toujours très méthodique, qui me donne une structure de course et qui me permet de fragmenter le parcours en section de 20 minutes. Toutes les vingt minutes, quelque chose doit se passer : de l’eau, un gel, une capsule de sel. Peu importe la technicité du parcours, peu importe les obstacles à venir, je cesse de réfléchir aux sentiers et j’avance vingt minutes à la fois.

J’atteins le dernier ravito avec l’espoir de terminer la course sans trop de heurts. Il y a beaucoup de descentes dans cette section. C’est habituellement quelque chose que j’aime beaucoup en fin de course parce que les jambes peuvent rouler toutes seules pendant que mon esprit vagabonde. Mais en voyant la technicité du dernier segment, je réalise que je dois encore m’accrocher, et ce, jusqu’au tout dernier kilomètre. Le dernier segment est l’un des plus impressionnants de la course : une descente abrupte, avec des roches très instables, ce qui demande une concentration de tous les instants.

À la fin de ce parcours intense, je suis toujours deuxième. La dernière surprise que nous réserve l’organisation est de nous faire gravir et redescendre une quinzaine de marches d’escalier dans l’amphithéâtre du lieu de départ. Je me suis fait accueillir par des applaudissements et des félicitations. Les organisateurs étaient très contents d’avoir une Québécoise sur le parcours!

En résumé, je vous recommande cette superbe course chez nos cousins français. Elle est parfaite pour les coureurs qui aiment les sentiers techniques. Allez vivre le Gem Trail, c’est tout simplement superbe!


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Source: Gem Trail

Mes essentiels pour la Gem Trail :

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Ariane Adam-Poupart

Pendant son doctorat en santé publique, Ariane a choisi la course sur sentier pour s’évader. Puis, elle a pris part à une première compétition de course longue distance en 2013. Cet événement a marqué le début d’une grande passion. Depuis, elle s’est lancé une tonne de défis de course, au Québec et ailleurs. Quand elle n’est pas en train de courir, Ariane cherche de nouvelles destinations de voyage pour aller découvrir le monde et planifie des activités de plein air dans de nouvelles contrées. Les Alpes en Suisse et Big Island à Hawaii font partie de ses coups de cœur.

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