Avec quelque 1800 kilomètres au compteur — la moitié de la distance à parcourir! —, Danielle a eu le temps de penser, de réfléchir, de peser son existence et d’arriver à certaines conclusions… et à de nouvelles questions. L’AT est pleine de surprise, même si jour après jour, la routine reste la même. Lever au petit matin, marche toute la matinée, puis dîner et marche jusqu’à la fin d’après-midi, moment où elle trouve un endroit pour se camper, se faire à manger et s’offrir une bonne nuit de sommeil. Voici donc ses réflexions du début du mois de juin.
Vous souhaitez suivre Danielle sur l’AT? Rendez-vous sur ce billet du Blogue La Cordée pour suivre sa trace sur une carte et découvrir toute une série de photos de son aventure.
Par Danielle Vibien, alias Grape
Pendant plus de quinze ans, j’ai rêvé de parcourir l’AT. Ce rêve avait quelque chose de sécurisant : il n’avait rien à voir avec la réalité. Dans mon rêve, l’AT se constituait d’une succession de randonnées d’une journée. La météo : au beau fixe. La température : un constant 16 °C avec une petite brise. Un soleil qui rend de bonne humeur.
Comme passer du rêve à la réalité me donnait le vertige, j’ai toujours réussi à trouver une excuse : « non, pas maintenant, je suis en couple », « non, pas maintenant, je viens de me séparer », « quand on sera deux », « quand je serai seule »… et le compteur tourne. À 55 ans, j’aimerais enfin pouvoir cocher ce projet!
Six mois de préparation et me voici engagée sur ce parcours mythique. Jour 63 pour moi sur l’AT. Je vous partage ceci : je l’ai rêvée plus douce, plus bienveillante cette AT. Je me retrouve plutôt sur un parcours de montagnes russes!
Des montées soutenues qui me font hyperventiler. Des descentes à pic qui me scient les deux genoux. De la rocaille à traverser où je me tords facilement les chevilles. Et la météo qui affecte directement mon moral! Après les froids des Smokey Mountains en Caroline du Nord, la pluie en Virginie est présente trois jours sur deux (oui, oui!). L’humidité ne décolle pas. Tout ce que je porte sur mon dos semble peser plus lourd… Je vis à la merci de mère Nature, je ne contrôle pas ses états d’âme! Et que dire des miens?
Plusieurs moments de découragement, des déconfitures magistrales que j’ai pu partager avec ma sœur Dominique qui m’a généreusement accueilli par Face Time. « Qu’est-ce que je peux faire pour t’aider, Danielle? »
Rien! À part être là. Ma sœur ne randonne pas, n’a pas de sac à dos, ne sait pas ce que c’est du lyophilisé. Et pourtant, elle me soutient à travers ce périple, je suis privilégiée.
Parcourir l’AT, c’est s’ouvrir à l’apprentissage de la vie en sentier. C’est pratiquer le lâcher-prise. C’est relativiser les obstacles qui semblent insurmontables. C’est constamment rechercher le confort dans ce qui est conçu pour être inconfortable.
Parcourir l’AT, c’est passer à travers. D’où l’expression : « I’m a thru-hiker ».
Mes proches me demandent si j’ai du plaisir. Écoutez : je suis à l’école de la vie en sentier. J’ai de bons moments, comme lorsque je marche au chant des oiseaux tôt le matin alors que je suis seule en forêt et que je ne croise aucun randonneur.
J’ai des moments plus difficiles à passer : je réfléchis beaucoup en marchant douze heures par jour. J’apprends à relativiser mes conclusions.
Plusieurs m’ont dit : « Danielle, tu es inspirante! »
Eh bien, les amis, je n’abandonne pas. Je poursuis ma route, déterminée à aller jusqu’au bout.
Défi physique, mental et émotif. Cette AT a tout ce qu’il faut pour me permettre d’aller plus loin et d’en sortir grandie.
Merci à ceux qui me soutiennent, je pense entre autres à Carl Tessier, mon collègue de La Cordée qui veille à me faire parvenir mes boîtes de nourriture au bon moment. Carl, je suis privilégiée, rien de moins!
Danielle Vibien
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