Le froid : s’exposer et s’adapter

L’hiver nous apporte chaque année son lot de journées glaciales. Le froid est-il dangereux ou encore bénéfique pour la santé? Est-il possible de s’adapter au froid et ainsi de profiter à plein de cette magnifique saison hivernale? Voici quelques mythes et réalités concernant la réponse du corps humain au froid et quelques recommandations pratiques pour l’affronter de façon efficace.

Mythe ou réalité 1. Le froid rend vulnérable aux infections et est potentiellement dangereux pour le système cardiovasculaire

Mythe. L’hypothermie rend le corps plus vulnérable aux infections. Par ailleurs, ceci est bien différent de l’exposition au froid sans diminution significative de la température corporelle. La température est en effet le plus souvent peu modifiée lorsque nous sommes bien habillés! D’autre part, les virus et autres microbes augmentent en concentration durant la saison hivernale et nous rendent donc plus vulnérables. Donc, un coup de froid seul en l’absence de virus ne vous donnera pas la grippe!

L’exposition au froid augmente les niveaux d’hormones de stress. Aussi, il n’existe pas de preuves scientifiques que ceci causerait des dommages cardiaques ou qui puisse nous rendre plus vulnérables aux crises cardiaques (infarctus du myocarde) ou encore aux accidents vasculaires cérébraux. Par prudence, les gens fragiles et/ou ayant une condition cardiaque connue devraient s’exposer graduellement au froid et surtout éviter de respirer l’air très froid. En effet, c’est surtout l’air froid inhalé plutôt que l’exposition du reste du corps qui causerait une augmentation du stress au niveau cardiaque.

Mythe ou réalité 2. Certains individus sont plus sensibles au froid.

Réalité. La grande majorité des individus peuvent s’adapter au froid. Par ailleurs, il existe certains individus plus vulnérables et moins adaptables au froid. Les sujets qui présentent une grande surface corporelle et une plus faible masse musculaire ou les adultes âgés de plus de 65 ans. La fatigue physique et mentale excessive influencent aussi de façon négative la réponse aiguë de même que l’adaptation chronique au froid. Il est donc faux de penser que les individus minces tolèrent moins bien le froid. L’important c’est la masse musculaire, car c’est celle-ci qui génère de la chaleur. Les femmes sont de façon générale un peu plus frileuse en raison d’une surface corporelle maintenue en présence d’une masse musculaire plus faible.

Mythe ou réalité 3. L’adaptation au froid nécessite une exposition de plusieurs semaines

Mythe. Il existe trois phases distinctes de l’adaptation au froid. L’exposition aiguë cause une constriction des petites artères du corps principalement des extrémités ainsi qu’un mécanisme de frisson. La première réponse diminuera la perte de chaleur alors que le frisson augmentera la production de chaleur par les muscles. La première phase est la phase de l’accoutumance au stimulus (« habituation »). Ce mécanisme est opérationnel après quelques jours seulement. Suite à une exposition aiguë de quelques jours, les hormones de stress, la constriction des petites artères et le mécanisme de frisson sont atténués de façon significative. C’est très bien. Nous devenons donc moins stressés et plus réceptifs psychologiquement au froid. Ce mécanisme opère localement (exemple : mains au froid) ou globalement (exposition de tout le corps au froid). Après plusieurs semaines, le métabolisme de base augmente. Cette deuxième phase constitue la période d’adaptation métabolique. Après plusieurs mois, la graisse sous-cutanée augmente et il y a donc adaptation structurelle de l’isolant causant une meilleure préservation de la chaleur interne.

Mythes ou réalités en rafale

L’alcool réchauffe. Ni mythe, ni réalité. L’alcool détend et il pourrait donc atténuer une vasoconstriction exagérée aux pieds et aux mains. En petite quantité, c’est bon! Par ailleurs, dépasser les quelques verres contribuera à abaisser la température corporelle et ainsi diminuera les défenses face au froid.

Le café est à proscrire. Mythe! Le café augmenterait la vasoconstriction et donc diminuerait la perte de chaleur centrale. Même si le café augmenterait la frilosité des mains ou des pieds, il élève le métabolisme de base! Encore une fois, c’est un feu vert en quantité raisonnable

Il faut manger plus gras lorsque exposé au froid. Réalité. Le nombre de calories apportées par un gramme de gras est le double du nombre de calories apportées par un gramme de sucre. Il est donc utile d’augmenter la consommation de « bons » gras de type poissons, huile d’olive, etc. dans ces circonstances.

La préparation psychologique au froid a peu d’importance. Mythe. Il faut approcher le froid de façon holistique et positive, sans avoir peur. Un esprit calme atténue la décharge des hormones de stress de façon efficace tout en améliorant la tolérance au froid. Adoptez une ou des techniques de relaxation et n’ayez pas peur d’aller dehors même par temps glacial… bien équipé quand même!

Lecture recommandée pour les curieux (en anglais seulement) :

Human physiological responses to cold exposure: Acute responses and acclimatization to prolonged exposure.

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Dr Michel White

Professeur titulaire de médecine et clinicien-chercheur à l’Institut de Cardiologie de Montréal, le docteur White s’intéresse aux divers aspects de la santé cardiovasculaire et de la physiologie de l’exercice. Il est aussi un amateur de plein air et un grand aventurier. C’est d’ailleurs lui qui a accompagné, pour la première fois de l’Histoire, un greffé cardiaque dans une ascension en haute altitude, au Mont-Blanc. Sans compter qu’il a aussi skié sur les deux pôles avec des patients greffés du cœur. De manière plus personnelle, le docteur White participe à des courses de longue distance, prend part au marathon canadien de ski de fond annuellement et pratique le vélo de façon régulière.